Eyes wide open
Fenêtres ouvertes sur le monde et miroir de l’âme, les yeux nous transmettent beaucoup plus d’impressions que les autres organes sensoriels. Voilà une raison suffisante pour les examiner d’un peu plus près!
Nous les parons d’ombres colorées, les entourons d’un trait de khôl, habillons leurs cils de mascara et leur offrons des crèmes spéciales. Bref, nous passons beaucoup de temps à mettre nos yeux en valeur. Il est donc grand temps de jeter un œil dans les coulisses de notre formidable appareil visuel, sans fard ni artifice. Nos yeux sont en effet une pure merveille de la nature.
Ils transmettent plus d’impressions que n’importe quel autre organe sensoriel. Ils enregistrent 10 millions d’informations par seconde et les relaient au cerveau. À la manière d’un appareil photo: la lumière traverse les différents éléments de l’œil – cornée, chambre antérieure, pupille, cristallin et corps vitré – comme si elle passait par un objectif avant d’atteindre la rétine. La lumière y converge et les images s’y forment. Le nerf optique transfère ces images de la rétine au cerveau. La combinaison des impressions visuelles issues des deux yeux crée une représentation spatiale de notre environnement: nous voyons!
La cornée est la fenêtre de l’œil: elle laisse entrer la lumière. Composée de fibres de collagène si finement tissées qu’elles forment un dôme transparent épais d’environ un demi-millimètre, elle regroupe les rayons lumineux entrants et produit une image sur la rétine.
La sclérotique (le blanc de l’œil) protège des blessures. Elle enveloppe complètement le globe oculaire, sauf à deux endroits: à l’avant pour la cornée et à l’arrière pour le nerf optique.
L’iris est le diaphragme coloré de l’œil. Deux muscles y gèrent la contraction ou la dilatation de la pupille en fonction de la luminosité. La couleur de l’iris est une caractéristique immuable, qui est même utilisée pour les passeports. Il contient environ 260 particularités biométriques, c’est-à-dire plus qu’une empreinte digitale! Voilà pourquoi le scan de l’iris est plus sûr que la prise d’empreintes.
La pupille est l’ouverture au centre de l’iris. Elle varie selon la luminosité: s’il fait clair, l’ouverture est minuscule mais dans l’obscurité, elle s’agrandit pour laisser passer un maximum de lumière. Les émotions ont également une influence: la pupille se dilate en cas d’excitation, de peur ou de joie.
Le cristallin concentre la lumière qui entre par la pupille afin de faire apparaître une image nette sur la rétine. Il est élastique et peut modifier sa réfrangibilité pour faire une mise au point sur des objets proches ou lointains. Avec l’âge, il devient de plus en plus rigide et sa réfrangibilité diminue – au stade final, cela se traduit par la presbytie.
Le corps vitré est une substance transparente et gélatineuse qui remplit la cavité oculaire entre le cristallin et la rétine.
La rétine est la membrane qui tapisse la face interne de l’œil: 127 millions de récepteurs de lumière la recouvrent et expliquent son extrême photosensibilité. Ces capteurs transforment la lumière en impulsions nerveuses. Les récepteurs en forme de cônes permettent de voir les couleurs, ceux en forme de bâtonnets jouent un rôle dans la vision diurne et nocturne.
Brun, bleu, gris, vert…
À quoi devons-nous la couleur de nos yeux? Et quel est le rôle de nos ancêtres à cet égard? Le mot clé est «mélanine»: ce pigment brun détermine non seulement la couleur de notre peau et de nos cheveux, mais aussi celle de nos yeux – ou, plus précisément, la couleur de l’iris. Plus la quantité de mélanine stockée dans l’iris est importante, plus les yeux sont foncés. Une faible concentration de mélanine donne – selon le dosage – des yeux verts, bleus ou gris. Moins il y a de mélanine, plus les yeux sont clairs (c’est-à-dire plus bleus). La façon dont la lumière se diffuse lorsqu’elle arrive dans l’œil influence aussi la couleur: la mélanine absorbe la lumière et empêche sa réflexion, ce qui donne une couleur plus foncée. Quand les yeux sont moins pigmentés en revanche, une plus grande quantité de lumière est réfléchie: ils sont donc plus clairs.
La couleur d’yeux la plus répandue à travers le monde est le brun, que l’on retrouve (selon les statistiques) chez 70 à 80, voire 90 % des gens. Le reste est réparti entre le bleu (8 à 10 %), le noisette (5 %), l’ambre (5 %), le gris (3 %) et le vert (2 %).
Il arrive, dans des cas très rares, qu’une personne ait des yeux de couleur différente. Cette mutation génétique s’appelle hétérochromie de l’iris. Elle touche par exemple l’actrice Kate Bosworth: son œil gauche est bleu, tandis que le droit présente aussi une grande tache brune.
La mélanine est en quelque sorte un mécanisme de protection contre les rayons UV. Ce n’est donc pas un hasard si les personnes vivant dans des pays très ensoleillés ont la peau et les yeux plus foncés. Les personnes à la peau pâle et aux yeux clairs se trouvent principalement dans les pays nordiques. Comme leurs yeux sont plus sensibles à la lumière, elles doivent impérativement porter des lunettes de soleil lors de séjours dans le sud ou en montagne.
Par ailleurs, si les bébés à la peau claire ont souvent les yeux bleus à la naissance, c’est parce qu’ils ont très peu de mélanine à ce moment. C’est seulement vers la fin de la première année du nourrisson que l’on sait s’il gardera ou non les yeux bleus. La couleur des yeux du bébé dépend en effet de celle de ses parents. Il existe des couleurs d’yeux dites dominantes ou récessives: la récessive est évincée par la dominante – autrement dit, une couleur d’yeux est plus forte qu’une autre. Le brun arrive en tête des couleurs dominantes, suivi par le vert, le bleu et le gris. Par exemple, si l’enfant a un parent aux yeux bruns et un parent aux yeux bleus, il aura très probablement les yeux bruns. Cette explication est bien sûr simplifiée. En réalité, les scientifiques considèrent que pas moins de 16 gènes sont impliqués. Voilà pourquoi la couleur des yeux des bébés reste une grande surprise.
Clignez des yeux!
Notre «fenêtre sur le monde» est munie d’un store qui s’abaisse et se relève en une fraction de seconde: la paupière. Deux muscles l’actionnent: le muscle releveur de la paupière et le muscle orbiculaire de l’œil. Sous leur action conjuguée, les paupières se ferment par réflexe face à un nuage de poussière, une mouche ou une lumière vive, par exemple. Outre leur rôle protecteur contre les stimuli extérieurs ou les risques de blessure, nos paupières ont une autre mission importante. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous clignons des yeux toutes les 4 à 6 secondes en moyenne.
L’ouverture et la fermeture rapides des paupières renouvellent en effet le film lacrymal sur la cornée. Ce liquide salé protège l’œil du dessèchement mais lui apporte aussi du glucose, des protéines et bien d’autres nutriments. Du lysozyme par exemple, dont l’action antibactérienne protège des infections, ainsi que des vitamines A, B2, B6, B12 et C. Le liquide lacrymal dirige les particules étrangères vers le coin interne de l’œil afin de permettre leur évacuation. Le clignement contribue en outre à une vision nette.
À propos des larmes
Elles portent des noms différents en fonction de l’élément déclencheur. Il y a les larmes basales, qui humidifient la cornée chaque fois que nous clignons des yeux. Les larmes réflexes surviennent lorsque nos yeux sont irrités – à cause du vent ou de la fumée, lorsque nous coupons des oignons ou croquons dans un piment, p. ex. Enfin, certaines larmes nous montent aux yeux à cause d’émotions intenses comme la colère, la tristesse ou la joie. Toutes sont produites par trois glandes lacrymales situées au-dessus du coin externe de l’œil.
Si la fonction protectrice est facile à expliquer d’un point de vue biologique, les chercheurs n’ont pas encore identifié clairement les causes des larmes d’émotion. Selon la Deutsche Ophthalmologische Gesellschaft (DOG, société allemande d’ophtalmologie), les femmes pleurent jusqu’à 64 fois par an, contre maximum 17 fois pour les hommes. Ce n’est toutefois pas le cas lorsque nous sommes enfants: jusqu’à l’âge de 13 ans environ, les filles et les garçons pleurent aussi fréquemment. Ensuite, les femmes dépassent les hommes. Elles pleurent non seulement plus souvent, mais aussi plus longtemps: leurs larmes coulent six minutes en moyenne, contre deux à quatre minutes chez les hommes. D’après les chercheurs, cette production lacrymale différente entre les sexes a plusieurs raisons. Il y a bien entendu la socialisation de genre: dès leur plus jeune âge, les garçons entendent qu’ils doivent «prendre sur eux» et ne pas pleurer à chaudes larmes. D’autres éléments entrent sans doute en ligne de compte: on soupçonne par exemple que la prolactine, un transmetteur que les filles produisent davantage à la puberté, abaisse le seuil d’inhibition des pleurs.
Bien-être des yeux 2.0
Vous avez les yeux secs et fatigués après une journée au bureau? Rien d’étonnant car le travail sur ordinateur leur impose des efforts considérables. Ils ne sont pas faits pour fixer en permanence une surface proche, légèrement éclairée. En termes d’évolution, regarder directement une source lumineuse (l’écran, en l’occurrence) est une tâche tout à fait nouvelle, pour laquelle notre organe visuel n’est pas spécialisé. Bien au contraire: lorsque nous regardons directement une lumière, les cellules rétiniennes consomment beaucoup de rhodopsine. Certes, notre organisme produit lui-même ce pigment aussi appelé pourpre rétinien, e.a. à partir de la vitamine A. Il va toutefois sans dire que si la sollicitation est trop importante, la production ne suit plus. Les conséquences se manifestent sous la forme d’une grande fatigue et de problèmes de concentration. Quand nous travaillons sur écran, nous clignons moins souvent des yeux: au lieu de 15 fois par minute environ, la fréquence descend à 5 fois. Les yeux ne sont plus assez humidifiés et s’assèchent. Les particules de poussière ne sont pas évacuées et irritent la cornée.
Il est donc recommandé de leur accorder une pause toutes les demi-heures afin de regarder au loin. Dans la plupart des cas, il suffit d’observer la rue par la fenêtre. Roulez aussi des yeux dans tous les sens, en ayant pleinement conscience de l’exercice. Ce mouvement aide à bien répartir le film lacrymal sur la surface des yeux. Couvrez vos yeux de vos mains. Fermez les paupières et gardez cette position quelques secondes. Cette technique appelée «palming» est facile à réaliser devant votre bureau ou chez vous, sur le canapé. Pour le yoga des yeux, la règle des 20-20-20 s’applique: toutes les 20 minutes, regardez quelque chose qui se trouve à au moins 20 pieds (env. 6 mètres) pendant 20 secondes. Clignez ensuite des yeux à plusieurs reprises.
Eyes: Quelques faits et chiffres étonnants – nos yeux sont merveilleux!
10 à 15 fois par minute, soit 14’400 par jour et 5 millions par an: ces chiffres correspondent à la fréquence à laquelle une personne adulte cligne des yeux. Un clignement dure 100 à 150 millisecondes et est exécuté par le muscle orbiculaire – le plus rapide de notre corps. Vu la rapidité du battement, l’obscurité et l’absence d’informations sont tellement fugaces que nous ne nous les percevons généralement pas.
Lorsque nous éternuons, nous fermons les yeux par réflexe. Impossible de faire autrement car l’éternuement provoque automatiquement une contraction des muscles du corps, y compris ceux des yeux. Les paupières servent en outre de protection contre les corps étrangers et les germes.
Une larme pèse env. 15 milligrammes. Nous en versons plus ou moins 28 litres au cours d’une vie.
127 millions de récepteurs de lumière recouvrent la rétine. Ils transforment la lumière en impulsions nerveuses une fois qu’elle a traversé la cornée, le cristallin et le corps vitré. Le nerf optique transmet ces impulsions nerveuses au cerveau. C’est seulement là que les images se forment – en quelques fractions de seconde, à partir de quelque 10 millions d’informations en 600’000 nuances.
6 muscles assurent la mobilité de l’œil: quatre muscles droits et deux muscles obliques. Nous parvenons même à «rouler» des yeux. Les muscles oculaires externes font d’ailleurs partie des plus actifs de notre corps.
L’œil est entouré de plus de 200 cils en moyenne. Les cils supérieurs sont plus nombreux, ceux du bas sont plus longs. Leur durée de vie est de 2-3 mois.